lundi 19 septembre 2016

Toute la misère du monde, bis

Quand j'ai commencé ce blog, je voulais le consacrer à l'autisme. Mais il se passe des choses en Europe au sujet desquelles je ne peux pas me taire.

Ma grand-mère me parlait hier des déclarations de Nicolas Sarkozy au sujet des migrants. Elle exprimait un accord timide avec ses propos, alors qu'il y a plusieurs mois, elle disait comprendre les demandeurs d'asile qui fuient la Syrie et l'Irak : elle se souvient de sa propre terreur lors de la Deuxième Guerre Mondiale, et comment sa famille a fui la Belgique, réfugiés eux aussi ! Pour la première fois, je me suis mise en colère devant elle, alors que je l'adore et que nous sommes très proches.

Question, donc, à Nicolas Sarkozy à propos des demandeurs d'asile : "Est-ce que, vraiment, c'est insoutenable, 12 000 personnes sur 65 millions?"

Je passe outre son ton condescendant envers la journaliste... Il ose donner la réponse la plus populo, la plus exagérée et la plus ridicule à mon sens : "La France ne peut pas accueillir toute la misère du monde". Parce que 12 000 personnes, c'est toute la misère du monde ? Bordel, il y a des MILLIARDS de gens qui souffrent par le monde, on ne nous a jamais demandé de TOUS les accueillir ! Il a encore le toupet de dire que ceux qui se voient refuser l'asile tombent dans l'illégalité (ce qui est souvent vrai, je l'admets) pour "profiter d'autres possibilités". Quelles possibilités, au juste ? Quand on est sans papiers, on a aucun accès à la protection sociale ou aux soins de santé (sauf les soins d'urgence... et encore !), aucun accès à un emploi déclaré, aucun espoir de bâtir une vie meilleure. Ils restent parce que chez eux, ils n'ont plus rien que la mort et les ruines, la menace et la souffrance.

"La France et l'Europe sont les continents, les pays les plus généreux". Laissez-moi rire ! L'accueil des demandeurs d'asile en France? Zéro pointé. Un exemple : une dame qui avait demandé l'asile en Belgique et avait accouché sur le territoire belge a été renvoyée en France car elle tombait sous le "Règlement Dublin". Sa terreur était de se retrouver à la rue avec son bébé. Nous avons tenté de la rassurer, car sûrement, la France ne laisserait pas à la rue une mère et son nouveau-né ? Apparemment, si. Nous avons appris par après qu'il n'y avait de place nulle part pour elle. Quelle générosité, en effet !

Les demandeurs d'asile, je les fréquente tous les jours. Ils ne sont pas ici pour profiter. Chez eux, ils exerçaient des professions libérales, vivaient dans de grandes villas, roulaient dans de belles voitures. Ils ont tout perdu, détruit par les bombes, et/ou vendu afin de fuir. Dans mon centre, ils vivent dans un ancien hôpital vétuste, partageant une chambre avec 3, 5, 7 autres personnes ; des cuisines et des douches avec 15 ou 20 personnes... Ils attendent 6 mois, 9 mois, un an ou plus une réponse du CGRA. Si leur demande d'asile est acceptée, il leur faudra trouver un logement et un emploi, en partant de zéro (alors que, je le répète, avant la guerre, chez eux, ils avaient tout). C'est profiter, ça ?



Je ne parle même pas du fait que le statut de réfugié, d'illimité, est devenu limité à 5 ans (donc, vous passez 5 ans à reconstruire votre vie, puis, potentiellement, paf ! on peut vous prier d'aller voir ailleurs).

Et ceux qui sont déboutés ? Nombreux sont ceux qui me disent : "Rentrer au pays, j'aimerais bien, si je pouvais, mais ce n'est pas possible. Si je rentre, je suis mort."

Dites-moi : que répondre à une dame qui a vu sa demande d'asile refusée, qui a tout vendu au pays pour payer les passeurs, dont la famille là-bas a soit été massacrée, soit a disparu... et qui vous dit : "Si ce n'était que moi, ce ne serait pas si grave.  Mais mes filles [7 et 13 ans], que vont-elles devenir ? Elles commencent leur deuxième année à l'école en Belgique, elle parlent bien français... que vont-elles devenir ?"



Vous pourriez la regarder dans les yeux et lui dire : "Désolé, Khadija*, on ne peut pas accueillir toute la misère du monde !" ?
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 * Khadija est un nom d'emprunt, et les photos proviennent d'internet et non pas de mon centre, par respect et pour protéger la vie privée des personnes dont je m'occupe.

lundi 18 juillet 2016

A-t-on encore le droit d'être faible?

La ministre belge de la santé, madame Maggie De Block, semble en avoir assez des malades de longue durée, ces fainéants qui ne veulent pas travailler. Elle menace de sanctions les gens qui, selon elle, ne coopéreraient pas à leur réinsertion sur le marché de l'emploi. Pour évaluer si les malades coopérent ou non, elle propose de leur envoyer des médecins pour contrôler s'ils sont réellement incapables de travailler.
"Un service composé de cinq médecins est en train d'être mis en place. Il rencontrera 7.500 malades par an afin de déterminer s'ils sont réellement incapables de reprendre le travail ou si leur médecin a trop vite tendance à les laisser à la maison. "Certains médecins ont tendance à accorder trop facilement des certificats", constate Maggie De Block."

Parce que bien sûr, des médecins extérieurs seront bien meilleurs juges de la santé du patient que le médecin traitant qui connaît son patient ainsi que ses antécédents médicaux et psychologiques, ses vulnérabilités et ses besoins...

Dans les malades longue durée, qu'en est-il des personnes souffrant de fibromyalgie ou de dépression, ou encore de troubles neurologiques comme l'autisme? Des difficultés qui sont, par nature, très compliquées à démontrer, à prouver ; pourtant, elles sont bien réelles.

Le repos médical n'est pas une période de vacances. J'ai souffert de dépression pendant plusieurs années, et j'ai été mise en repos par mon médecin traitant pendant plusieurs mois. À d'autres occasions, j'ai dû prendre quelque jours de repos à cause du stress afin d'éviter le burn-out. Enfin, je souffre régulièrement de migraines qui m'empêchent de fonctionner. Rester à la maison ne m'amuse pas. Je préfère travailler ! Mais quand je suis mal, le repos est meilleur pour mon intégrité physique et psychique.

Hors service

Mon médecin traitant n'hésite jamais à me donner un certificat quand je vais mal parce qu'elle sait que je suis autiste, que je suis très fragile face au stress, et que je suis susceptible de dépression et de burn-out. Elle sait quand j'ai sérieusement besoin de lever le pied sous peine de m'effondrer complètement. Mais bien sûr, elle est sans doute tout bonnement trop indulgente avec moi, et je n'ai qu'à mordre sur ma chique quand je suis à bout, je suppose.

lundi 23 mai 2016

A fleur de peau : l'anxiété chez les autistes

Beaucoup de personnes autistes souffrent d'anxiété. Aujourd'hui, j'aimerais vous parler de ce qui peut provoquer cette anxiété, voire déclencher une véritable crise d'angoisse.

Lorsque je travaillais dans un supermarché, un de mes collègues aimait nous faire des blagues. Il les trouvait très drôles, mais pour moi, voici comment cela se passait.

Je commence mon travail. Je suis très occupée à mettre du pain frais en rayon, quand, tout à coup, un coup de klaxon brutal résonne dans mon dos.
 
Je fais un bond. Mon coeur se met à battre la chamade, la tête me tourne, mes mains sont moites. Les larmes me montent aux yeux en même temps qu'une rage dans la poitrine. Je me retourne et je vois mon collègue sur le chariot élévateur, hilare. Il se rend immédiatement compte que je suis en colère, et il me dit en haussant les épaules : "Rigole, c'était une blague!"

Une blague n'est pas drôle quand c'est aux dépends de quelqu'un. Il se trouve que les bruits forts et soudains provoquent beaucoup d'anxiété chez moi et affectent mon humeur pour le restant de la journée.


Cet exemple illustre l'une des causes d'anxiété chez les autistes :

1. Les difficultés sensorielles. Les autistes sont souvent extrêmement sensibles au bruit, à la lumière, aux stimuli visuels ou au toucher. Une connaissance atteinte, comme moi, du syndrome d'Asperger, porte constamment des lunettes de soleil et une casquette parce que la lumière du jour et celle des néons est trop violente pour lui. Un volume sonore élevé provoque en moi un véritable incomfort physique, parfois même de la douleur, et me met sur les nerfs pour longtemps. C'est aussi le cas si on me touche sans que je ne m'y attende : parfois, quelqu'un pose amicalement la main sur mon épaule et je sursaute. Assurez-vous toujours qu'une personne autiste est d'accord avant de la toucher ; d'ailleurs, cela ne devrait-il pas s'appliquer à tout le monde? Mon corps m'appartient. Moi seule peut décider qui peut le toucher, et quand. Les stimuli auditifs ou visuels peuvent aussi provoquer une véritable surcharge pour notre cerveau, qui ne parvient pas à les trier. L'anxiété ainsi déclenchée peur mener jusqu'à l'effondrement mental. Cette vidéo illustre bien la surcharge sensorielle ressentie par un autiste :

 

2. L'incertitude :  ne pas savoir ce qui se passe ou ce qui va arriver, ou ne pas savoir ce qu'on attend de nous. Vous savez sans doute que les autistes ont besoin de routines. Par contre, vous ne savez peut-être pas qu'il ne s'agit pas là d'une simple préférence. Quand il se passe quelque chose d'inattendu, nous sommes complètement perdus, incapables de réagir, et nous paniquons.

La plupart des règles et routines qui rythment notre quotidien changent en fonction des circonstances, mais pour les autistes, ces changements constituent une épreuve. Par exemple, imaginons que vous ayez interdit à votre enfant autiste d'entrer dans la buanderie, parce que vous ne voulez pas qu'il touche à la machine à laver ou à la poudre à lessiver.  Mais aujourd'hui, il a joué dehors et ses vêtements sont couverts de boue, alors vous l'emmenez directement dans la buanderie pour enlever ses vêtements. L'enfant ne comprendra pas pourquoi vous l'emmenez dans un lieu interdit. La crise émotionnelle ou le refus d'obtempérer n'est pas une désobéissance obstinée, un désir de vous mettre en colère ou un comportement "méchant". Plutôt, son comportement révèle une profonde angoisse face à une situation incompréhensible pour lui. Il faut soit vous en tenir à la règle ("On ne va pas dans la buanderie"), soit, si votre enfant est en mesure de comprendre vos explications, lui dire que dans ces circonstances et sous votre surveillance, il peut, aujourd'hui, entrer dans la pièce interdite. On utilise souvent des "scénarios sociaux" en images pour expliquer aux enfants autistes ce que l'on attend d'eux dans une situation donnée.

3. Les interactions sociales. Les autistes ont du mal à comprendre les signaux et les conventions sociales, voire le langage ; et ils ont des difficultés à communiquer de manière appropriée. Même si on nous a inculqué comment interagir convenablement avec les autres, cela reste un comportement appris et non pas inné. Cela demande un effort et une réflexion constante de notre part pour maintenir le bon comportement, et c'est épuisant. De plus, si nous rencontrons des gens que nous ne connaissons pas, l'incertitude augmente notre stress : nous ignorons comment cette personne va agir, comment elle va nous affecter, et comment nous somme censés réagir ! On nous impose parfois des normes sociales que nous trouvons pénibles. Par exemple, dans ma région, les gens se saluent en se faisant la bise. Refuser de le faire est mal vu : on est considéré comme impoli ou asocial. Cependant, laisser quelqu'un toucher mon visage n'est pas facile pour moi. J'ai besoin d'avoir confiance en cette personne. Je suis donc mal à l'aise quand je dois faire la bise à des gens que je ne connais pas bien. Je n'ose pas refuser pour ne pas être impolie, mais cela augmente mon stress.

Les personnes autistes éprouvent des difficultés face à des choses qui ne posent aucun problème à la plupart des gens. S'il vous plaît, rappelez-vous que la personne en face de vous est peut-être confrontée à une profonde angoisse, même dans une situation qui vous semble tout à fait ordinaire.

samedi 16 avril 2016

7 préjugés sur l'autisme

Je profite du mois d'avril, le mois de la sensibilisation à l'autisme, pour parler de quelques préjugés. J'ai moi-même un trouble de type autiste : le syndrome d'Asperger. A ce titre, j'aimerais vous faire part de ce que je ne suis pas.

1. Je ne suis pas une "attardée". C'est un terme très injurieux de toute façon, qu'on ne devrait jamais employer pour désigner une personne. De plus, l'autisme n'a rien à voir avec le quotient intellectuel. Certains autistes sont extraordinairement intelligents ; d'autres souffrent de retards mentaux parfois profonds. D'autres encore se situent quelque part entre ces deux extrêmes. L'autisme peut affecter la capacité d'une personne à fonctionner de manière autonome, mais cela ne signifie pas qu'elle soit stupide. J'ai connu une oratrice autiste très intelligente, mais qui était totalement incapable de conduire ou de s'habiller seule.

2. A l'inverse, je ne suis pas un savant. C'est vrai, certains autistes sont des génies possédant des talents incroyables dans des domaines tels que les mathématiques, la musique, le dessin ou d'autres encore. Le syndrome du savant, dans lequel la personne affectée fait preuve de compétences exceptionnelles dans une domaine alors qu'elle semble très limitée dans d'autres aspects de sa personnalité, existe. Toutefois, toutes les personnes atteinte du syndrome du savant ne sont pas autistes, et tous les autistes ne sont pas des savants. Nous ne sommes pas nécessairement tous des génies. Ne vous attendez pas à ce que je sorte un talent intellectuel fabuleux de mon chapeau simplement parce que je suis autiste. Croyez-moi, j'ai assez de difficultés comme ça sans devoir faire face à des attentes irréalistes de la part de mes interlocuteurs.

 

3. Je ne suis pas malade. L'autisme n'est pas une maladie, c'est une différence neurologique. Tout comme la trisomie 21, il ne se soigne pas. Ne me parlez pas du traitement miracle au sujet duquel vous avez trouvé un article sur internet : un tel traitement n'existe pas. Ne me dites pas qu'en supprimant le gluten, je vais guérir : si je suis intolérante au gluten, ça va sûrement améliorer ma qualité de vie, mais ça ne guérira pas mon autisme. L'autisme, je le répète, n'est pas une maladie et ne se soigne pas comme tel. Nous pouvons (ou on peut nous aider à) mettre en place des stratégies pour mieux fonctionner et développer tout notre potentiel. Cependant, si je m'en sors bien dans la vie et que je développe mes capacités, cela ne signifie pas que je suis "guérie". Cela signifie simplement que j'ai appris à m'adapter et à m'épanouir.

4. Je ne suis pas "cassée". Je n'ai pas besoin d'être "réparée" ou guérie. Mon cerveau fonctionne différemment du vôtre, et donc, cela peut affecter notre capacité à nous comprendre, à communiquer et à nous entendre. Cela peut affecter ma capacité à vivre de manière autonome. Toutefois, je suis une personne qui a de la valeur et j'ai beaucoup à offrir. Si je reçois les bons tuyaux pour m'adapter à la société, je peux m'en sortir, et si, de votre côté, vous faites un effort pour comprendre comment mon cerveau fonctionne, nous pouvons très bien nous entendre.

5. Je ne suis pas égoïste et je ne manque pas d'empathie. Il est vrai que, lorsque je suis absorbée par une de mes passions, je perds la notion de ce qui m'entoure. Toutefois, je suis capable d'aimer les autres et de me soucier d'eux. J'ai des difficultés à comprendre un point de vue ou une expérience qui m'est étrangère. Le langage corporel, la gestuelle, les expressions du visage sont souvent difficile à déchiffrer pour moi. Je n'ai pas conscience des sous-entendus. Pour ces raisons, je ne me rendrai peut-être pas compte de ce que vous ressentez, et je vais peut-être alors vous paraître insensible, voire manquer de tact. Toutefois, si vous m'expliquez tout simplement ce que vous ressentez, je serai alors pleine d'empathie et désireuse de vous aider. Vous comptez pour moi ; c'est juste que je n'ai pas toujours les bons outils pour décoder vos émotions. De même, parce que je ne parviens pas à m'imaginer ce que vous pensez ou ressentez, je ne vais peut-être pas me rendre compte de l'impact que mes paroles ou mon comportement peuvent avoir sur vous. Il se peut que je vous blesse sans le vouloir. Cependant, si je m'en rends compte, je serai confuse et je voudrai de tout coeur réparer ma "faute", et ce faisant, je vais peut-être empirer les choses par ma maladresse! Soyez patient avec moi. J'apprends constamment.

6. Je ne suis pas asociale. On me dit parfois : "Autiste? Toi? Mais tu as des amis, tu es sociable!" S'il est vrai que certaine personnes autistes ne s'intéressent pas beaucoup aux autres, ne vous imaginez pas que c'est le cas pour l'ensemble des autistes. Certains d'entre nous aimeraient désespérément se faire des amis, mais éprouvent énormément de difficultés à entrer en relation avec les autres à cause de leurs probèmes de communication, d'interaction sociale et d'imagination (voir mon article Asperquoi ?). Certains parviennent à acquérir suffisamment d'habiletés sociales que pour se faire des amis et se socialiser, mais cela reste épuisant mentalement, car ce qui vous vient naturellement est un effort et une réflexion constante pour nous. Que dois-je dire maintenant? Ce commentaire est-il poli ou vais-je offenser mon interlocuteur? Qu'est-ce qu'il a voulu dire par là? Est-ce mon tour de parler? Pourquoi a-t-il fait cette grimace, ai-je dit quelque chose de mal? Oups, je parle de ma passion depuis 5 minutes non-stop, je vais l'ennuyer. Que pourrais-je lui demander pour orienter la conversation vers lui? Zut, je bégaie d'anxiété... J'évite les grandes fêtes, car mon cerveau n'arrive pas à assimiler et trier toutes les informations qui lui arrivent (conversations à plusieurs interlocuteurs, bruits de fond, chanson qui passe et dont j'entends toutes les paroles...) Enfin, ceux d'entre nous qui ont des amis ont souvent eu la chance de rencontrer des personnes compréhensives et ouvertes d'esprit, qui sont passé outre nos maladresses sociales et de nos manies bizarres et nous aiment tels que nous sommes.

7. "On est tous un peu autiste, non ?" ... Non, pas du tout.

Je suis de plus en plus agacé d'entendre des gens dire: "On est tous un peu autiste" en décrivant une de leurs petites manies.

A tous les neurotypiques (c'est-à-dire les non-autistes, dont le cerveau fonctionne d'une façon "typique") :

- Etre quelqu'un de très organisé ne fait pas de vous un autiste. (D'ailleurs, moi, je suis plutôt brouillon!)
- Ranger vos chaussettes par couleur ne fait pas de vous un autiste. Au pire, vous souffrez d'un léger TOC (trouble obsessionnel compulsif).
- Etre agacé par des changements de dernière minute ne fait pas de vous un autiste. Il y a une grande différence entre l'agacement, et une anxiété profonde, voire une réelle détresse.
- Etre très concentré sur une tâche ne fait pas de vous un autiste. Etre incapable d'être attentif à quoi que ce soit d'autre en même temps, oui.
- Préférer la solitude ne fait pas de vous un autiste. Tous les introvertis ne sont pas autistes, et les autistes ne sont pas nécessairement asociaux.

Si vous n'éprouvez pas de sérieuses dificultés dans les domaines de la communication sociale, de l'interaction sociale et de l'imagination sociale, ainsi que des troubles sensoriels, vous n'êtes pas autiste. En prétendant, même par plaisanterie, que vous l'êtes, vous minimisez les difficultés que nous, les vrais autistes, éprouvons dans la vie de tous les jours.

mercredi 23 mars 2016

Le petit guide anti-terroriste

J'aime beaucoup cette photo.



Elle a été prise peu avant mon départ d'Angleterre en 2012. Ce sont mes deux amis et anciens collègues, Lexi et Sara. Je suis chrétienne protestante, Sara est musulmane, et Lexi est athée et, incidemment, transexuelle. Nous sommes amis.

J'aime cette photo non seulement parce que Lexi et Sara sont mes amis, mais aussi pour ce qu'elle représente : la possibilité d'être amis au-delà de nos différences, même si nous ne sommes pas d'accord sur tout.

Après les attentats de Paris, après les attentats de Bruxelles, il est plus urgent que jamais d'être unis pour combattre le terrorisme. Alors aujourd'hui, je vous présente le petit guide anti-terroriste.

Les terroristes emploient la violence pour arriver à leurs fins. Ils veulent, évidemment, nous terrifier et nous persuader que ne nous pouvons plus vivre en sécurité. Or, si de tels attentats nous choquent à l'extrême, il est bien moins probable de mourir dans un attentat terroriste que de mourir d'autres causes telles qu'un accident de voiture ou une maladie. La violence de tels actes nous choque à juste titre, mais ici, en Occident, ils restent une cause minime de décès.

Les terroristes cherchent également à nous diviser, comme je l'ai mentionné hier, et plus spécifiquement, ils veulent nous pousser à rejeter en bloc les Musulmans. De cette façon, ils espèrent que de plus en plus d'entre eux se radicalisent à leur tour. Bien sûr, je ne cherche en aucun cas d'excuses au terrorisme islamiste. Toutefois, je m'interroge. Si tout au long de ma vie en Europe, j'avais été traité de "sale Arabe", si, à cause de mon ethnie perçue et/ou de ma religion, on m'avais refusé des emplois ou un bail, si je me sentais méprisé et dénigré, puis qu'un jour quelqu'un arrivait en me disant : "Mon frère (ou ma soeur), tu auras de la valeur à nos yeux. Tu seras respecté. Tu seras un héro! Rejoins-nous, et tu feras de grandes choses pour Dieu"... qu'aurais-je fait? Je pourrais être animé par un désir de vengeance, de faire payer aux autres le mépris et l'injustice. Bien sûr, toutes les personnes victimes de racisme et d'injustice ne deviennent pas terroristes (heureusement pour nous!), mais je suis convaincue qu'on ne se fait pas exploser si on est en paix avec soi-même et avec le monde. On ne deviens pas terroriste par hasard...

Donc, par définition, les terroristes cherchent à nous terroriser, d'une part, et d'autre part, à nous diviser. Si nous vivons dans la crainte, ils auront gagné. Et si nous stigmatisons et rejetons nos voisins musulmans, là encore, les terroristes auront gagné.

Comment les combattre? Comment résister?

1. Résistons à la peur. Ne les laissons pas gâcher nos vies. Continuons à vivre et à aimer. Continuons à aller à Bruxelles, à Paris, à Londres. Nous mourrons tous, mais il est peu probable que ce soit dans un attentat... alors ne laissons pas les terroristes nous empêcher de vivre libres.

2. Résistons à la haine. Tendons la main à l'autre, à celui qui est différent. Accueillons tous le monde sans préjugés : musulman ou non, Belge ou immigré, réfugié, issu d'une culture semblable à la notre ou très différente.

3. Tissons des liens. Vous avez des amis musulmans, ou étrangers ? Super! Passez du temps avec eux. Approfondissez votre amitié. Interrogez-les sur leur culture, leurs goûts, leurs passions, leurs valeurs. Vous n'en avez pas ? C'est pas grave. Ils sont sans doute vos collègues, vos voisins. Dites-leur bonjour. Invitez-les à prendre un café. Faites connaissance. Découvrez qui ils sont. Partagez un repas ou une toile.

4. Informons-nous. Ne nous contentons pas de ce que disent les médias et les réseaux sociaux. Vérifions les informations. Lisons des vrais livres pour approfondir les sujets qui nous inquiètent. Parlons à des gens qui connaissent le sujet. Vous vous posez, par exemple, des question sur les demandeurs d'asile? Coucou, je suis là! Je travaille avec eux, je les côtoye tous les jours. Que voulez-vous savoir?

5. Célébrons nos différences (tant qu'elles respectent, bien sûr, les valeurs démocratiques et les Droits de l'Homme). Elles sont un enrichissement, une découverte, un voyage.

Voilà mon petit guide idéaliste anti-terroriste...


mardi 22 mars 2016

Je Suis Humain

Ce matin, je prenais mon petit déjeûner lorsque j'ai entendu la nouvelle au sujet des attentats de Bruxelles.

J'ai ressenti un immense chagrin. Mon coeur est avec les victimes et leurs familles. Ce doit être atroce de vivre une telle souffrance et une telle terreur. 

Toutefois, je n'oublie pas non plus que cette souffrance, cette terreur, est le quotidien de millions d'être humains, en Syrie, au Yémen, et partout dans le monde où il y a des conflits. Je suis remplie de chagrin pour ceux-là aussi, qui souffrent chaque jour.

Mon chagrin a une autre cause. J'ai peur pour mes frères et soeurs Musulmans. Je n'ai pas peur d'eux, j'ai peur pour eux. Ils sont de plus en plus stigmatisés et harcelés, alors que la vaste majorité d'entre eux n'ont aucune haine envers leur prochain et aucun désir de violence. Je crains pour leur bien-être et leur sécurité, comme je l'avais déjà craint après les attentats de Charlie Hebdo et ceux de Paris en novembre dernier. S'ils ne rencontrent que crainte, hostilité, haine et insultes, comment peuvent-ils vivrent en paix parmi nous? Or, c'est exactement le but de Daesh

"Les attentats de Paris pourraient provoquer de nouvelles vagues d'islamophobie en France et au-delà, ainsi que de la crainte envers les réfugiés venus de Syrie et d'autres pays. C'est exactement ce que veut Daesh : le groupe a juré de rendre impossible aux Musulmans une existence paisible en Occident." Daesh veut forcer les Musulmans à choisir un camp dans cette nouvelle guerre mondiale qu'il espère déclencher. Daesh veut que les Musulmans se sentent rejetés et harcelés afin qu'ils n'aient qu'une seule option : le radicalisme. Le but des terroristes est de nous effrayer et de nous diviser, de cultiver la haine. 

Si nous rejetons les Musulmans et les réfugiés, si nous nous laissons gagner par la terreur et la haine, Daesh aura gagné. Et moi, je refuse de les laisser gagner.

Je refuse d'être terrorisée. Je refuse d'avoir peur de vivre. Je refuse d'avoir peur d'aimer et d'accueillir mon prochain. Je refuse d'avoir peur de l'autre, de l'étranger, de celui qui est différent. Je refuse d'avoir peur du Musulman, du réfugié. Je refuse de laisser la terreur nous diviser. Je refuse la haine, je refuse le rejet, je refuse l'hostilité.

Je veux choisir l'amour, l'hospitalité, la solidarité, la compassion, la patience, le pardon. 

Je ne suis pas Bruxelles... je ne suis pas que Bruxelles. Je suis la soeur de tous ceux qui souffrent. Je ne veux pas les laisser nous diviser, car au-delà de nos différences, nous sommes un seul peuple : le peuple de la terre. Nous somme une seule race : la race humaine. Nous avons tous un père et une mère. Nous pleurons tous les mêmes larmes et nous saignons tous le même sang. Nous sommes tous humains.

Je suis humain. 



Mon espoir et ma prière est que ces terribles évènements nous unissent au lieu de nous séparer.

" L'obscurité ne peut pas chasser l'obscurité; seule la lumière le peut. La haine ne peut pas chasser la haine; seul l'amour le peut." - Martin Luther King